Préqualification
Feuille de route
Préqualification DPP
L’ensemble du développement de la formulation et de la fabrication des lots pilotes et cliniques sera mené conformément aux Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF), tandis que les analyses seront effectuées dans un laboratoire certifié BPL suivant les normes internationales de qualité de l’OMS.
Etude de bioéquivalence
Cette étude de bioéquivalence croisée classique, randomisée, bidirectionnelle, suit les directives de l’OMS.
L’étude sera menée à Addis-Abeba (Éthiopie) chez des volontaires sains adultes hommes et femmes qui ne sont ni déficients en G6PD, ni allergiques à la primaquine ou qui ne présentent aucun autre critère d’exclusion dans leurs analyses de laboratoire et leurs antécédents médicaux.
Sur la base des évaluations pharmacocinétiques précédentes de la primaquine et de la carboxyprimaquine chez les volontaires sains, jusqu’à 50 sujets seront recrutés. Ils seront admis à l’hôpital et randomisés pour recevoir soit le comprimé de référence, soit le générique de 15 mg, à jeun avec un volume d’eau standard (ex. 150 ml). Des prélèvements sanguins seront effectués de manière intensive pendant 24h via un cathéter intraveineux.
Les volontaires sortiront de l’hôpital et reviendront 3 jours après pour leur suivi avec des tests sanguins de routine. La période de sevrage sera d’au moins 7 jours à compter de la première dose de primaquine et les sujets seront réadmis pour le deuxième cycle de dosage avec l’autre forme de primaquine, et un suivi au troisième jour également.
Les échantillons de plasma seront analysés et les principaux paramètres pharmacocinétiques (Cmax , AUC0-t, AUC0-∞) de bioéquivalence seront déterminés par une analyse non compartimentale.
Préqualification par l’OMS
Dès que les analyses démontreront que le comprimé générique sécable de 15 mg est bioéquivalent au comprimé de référence produit par Sanofi, le dossier de préqualification sera soumis à l’OMS par le fabricant IPCA avec le soutien de ce consortium.
Les comprimés de 2,5 à 7,5 mg seront conçus avec une formule de valeur proportionnelle à celle du comprimé de 15 mg. Des spécifications pharmaceutiques et des tests de contrôle seront réalisés sur les produits finis. Les analyses de laboratoire confirmeront la composition, l’activité et la proportionnalité de toutes les concentrations.
Leurs profils de dissolution in vitro seront comparés à celui du comprimé de référence 15 mg pour montrer leur équivalence, à la suite de quoi les dossiers de préqualification des dosages faibles de la gamme dans le cadre d’une dispense des études cliniques de bioéquivalence seront également soumis à l’OMS par le fabricant, toujours avec le soutien du consortium DPP.
Formulation & Packaging
Masquage de goût
Ce module de travail est dirigé par l’Ecole de Biologie Industrielle en France et comprend deux volets : une approche par des tests sensoriels gustatifs non cliniques (GST), suivie d’une étude d’acceptabilité dans les essais cliniques de validation sur le terrain. Ces études sensorielles gustatives non cliniques préliminaires permettront d’économiser du temps et de l’argent pour développer une formulation de primaquine aromatisée optimale pour la population pédiatrique.
Les études sensorielles menées par des groupes d’experts se feront par étapes pour identifier et sélectionner les meilleurs arômes masquant le goût amer du produit. L’effet masquant de l’ingrédient amer et les saveurs seront validés par le faible niveau d’amertume et analysé avec un logiciel tel que Tastel ® et «R».
Pour les panels d’experts, la primaquine sera initialement remplacée par une substance amère modèle (caféine ou quinine) qui sera mixée avec le mélange exact des excipients contenus dans le comprimé générique d’IPCA. Une fois les arômes sélectionnés, leurs propriétés de masquage de goût seront évaluées en présence de primaquine, et les meilleurs candidats seront validés. A partir de là, la formule des comprimés aromatisés sera finalisée, et les lots cliniques pour chaque dosage pédiatrique seront produits par IPCA pour réaliser les essais cliniques sur le terrain.
Granules
Ce travail sera réalisé par le LTPIB de l’Université de Bordeaux, France. Le développement de granules de primaquine est une alternative prometteuse aux comprimés pédiatriques car les granules sont une forme pharmaceutique de choix pour les jeunes enfants.
Produit à une dose fixe en mg/unité de poids, le même mélange de base peut être utilisé pour préparer les autres doses de la gamme, en ajustant simplement le volume de remplissage des sachets ou autre conditionnement, ce qui leur confère une grande flexibilité dans les procédés de fabrication.
La granulation est un procédé d’élargissement dans lequel de petites particules sont rassemblées en agrégats permanents plus grands. Ce procédé comprend l’agitation des poudres humidifiées dans un mélangeur, la compression, l’extrusion et la globulation, qui permettent d’obtenir un grain d’une taille définie. La granulation humide est un procédé standard dans lequel les propriétés des poudres sont améliorées pour faciliter la fabrication des comprimés et des granules. La formulation finale se fera en étroite collaboration avec l’équipe de l’EBI, et les formules aromatisées seront comparées à celles basiques non-aromatisées.
Une fois que la formule est optimisée en laboratoire, l’étape suivante consiste à transférer la technologie à un tiers industriel pour la mettre à l’échelle et produire des lots cliniques nécessaires pour réaliser une évaluation plus approfondie. Ce projet fera l’objet d’une future levée de fonds.
Avancées
Les travaux préliminaires de développement ont été réalisés comme prévus et ont permis d’obtenir une formule avancée des granules de primaquine dans le cadre du financement EDCTP2. Cependant des travaux supplémentaires sont nécessaires afin d’obtenir une formule optimisée et stable qui pourra être mise à l’échelle industrielle. Pour cela, un financement interne via le Medical and Life Sciences Translational Fund (MLSTF) a été obtenu par le coordinateur début 2022. Grâce au fond alloué par l’Université d’Oxford, MORU, ReMeD, LTPIB, EBI, et UCL ont pu étendre leur collaboration pour finaliser le procédé de fabrication et les ingrédients dans une démarche sensorielle et obtenir des formules optimisées dont il reste à déterminer la stabilité dans le temps en conditions tropicales. Les résultats seront connus d’ici septembre 2023. Lorsque la stabilité de la formule finale sera confirmée, les partenaires pourront passer à l’étape suivante avec un partenaire industriel et sous réserve d’un nouveau financement spécifique.
Packaging
Le LTPIB et ReMeD discuteront avec Bilcare, le partenaire industriel pour le packaging, de la conception de blisters optimisés. Bilcare produira différents prototypes dont l’acceptabilité sera évaluée dans les études sur le terrain en utilisant des questionnaires et des discussions de groupe.
Validation sur le terrain
Traitement radical
Il s’agira d’une étude observationnelle à un seul bras de traitement pour évaluer les paramètres pharmacocinétiques, l’efficacité et la tolérabilité de la primaquine chez des patients pédiatriques éthiopiens (<16 ans) atteints de paludisme aigu à P. vivax. Tous les patients recevront de la chloroquine en dose-poids standard, et de la primaquine dosée en poids selon un schéma allométrique optimisé conçu par l’équipe de MORU avec une dose cible de 0,25 mg / kg / jour pendant 14 jours (conformément aux directives nationales). Le suivi se fera sur six mois.
La primaquine sera conditionnée sous blister avec le nombre requis de comprimés pour un dosage adapté à chaque traitement, de sorte qu’aucun comprimé n’ait besoin d’être fractionné pour obtenir la dose adéquate. Toutes les doses de médicaments seront administrées par un membre de l’équipe de soin. Le statut G6PD des patients sera dépisté à l’aide d’un test de diagnostic rapide qualitatif fiable (Access BioCareStart ™) (LaRue, Kahn et al. 2014 ) (Roca- Feltrer , Khim et al. 2014 ). En cas de déficit (G6PDd), la primaquine sera administrée une fois par semaine à la dose de 0,5 mg / kg / semaine pendant 7 semaines (dosage allométrique optimisé).
Blocage de la transmission
Cet essai randomisé ouvert permettra d’évaluer la pharmacocinétique, l’efficacité anti-infectieuse et la tolérabilité de la primaquine administrée à dose unique faible (SLDPQ) chez des enfants burkinabè de moins de 5 ans atteints d’accès simples de paludisme à P. falciparum et n’étant pas à risque de complications.
Ces patients recevront comme médicaments antipaludiques de l’artésunate-pyronaridine et une dose unique de primaquine (dose cible 0,25 mg / kg), tous deux dosés en poids. Le schéma posologique du traitement à base de primaquine se fera selon l’échelle allométrique développée par MORU. L’activité anti-infectieuse des antipaludiques sera évaluée par des expériences de gorgement sur membrane à J0, J2, J3, J7 et J14.
Le statut G6PD des patients ne sera pas déterminé car les études suggèrent une bonne tolérabilité du traitement à dose unique de primaquine chez les patients déficients en G6PD (Taylor, non publié). Le suivi se fera sur six semaines (J42). Le critère d’évaluation principal est l’infectiosité des moustiques à J2, définie comme la différence dans les proportions de patients infectant ≥ 1 moustique dans les 2 bras de traitement (Dicko, Brown et al.2016).
Acceptabilité
Les études d’acceptabilité des comprimés aromatisés par rapport à la formule basique seront menées en Ethiopie et au Burkina Faso, intégrées aux deux essais cliniques de validation sur le terrain. L’acceptabilité sera évaluée à l’aide de CAST (ClinSearch Acceptability Score Test), un outil développé par ClinSearch, partenaire de l’EBI (Ruiz, Vallet et al. 2017). Il est basé sur un questionnaire qui comprend des éléments tels que la réaction de l’enfant à accepter le médicament, le résultat de la prise (quelle quantité de la dose a été prise), les méthodes utilisées pour parvenir à prendre le médicament (par ex. nourriture, boisson, restriction), et le temps nécessaire pour administrer la primaquine (Ruiz, Vallet et al. 2017).
En Ethiopie, trois comprimés seront utilisés: le comprimé enrobé basique et deux comprimés aromatisés, et leurs scores d’acceptabilité seront comparés. Au Burkina Faso, seuls les comprimés de primaquine aromatisés seront utilisés et leurs scores CAST seront comparés à ceux des granules d’artésunate-pyronaridine.
Les scores CAST seront analysés en positionnant visuellement les différentes formulations pédiatriques sur une carte d’acceptabilité à quatre clusters, pour définir un centroïde et une ellipse de confiance à 95% et classer les profils.
Plusieurs prototypes de blisters seront conçus par Bilcare, Inde (société de packaging), avec le LTPIB de l’Université de Bordeaux et en partenariat avec IPCA. Ces blisters seront présentés aux patients et évalués à l’aide d’un système de notation (à développer) comprenant la taille, la couleur, la facilité d’utilisation, la police du texte imprimé et la facilité à distinguer quel blister pour quelle catégorie de poids. La taille de l’échantillon pour cette étude exploratoire est de 50 patients ou personnes en charge par pays, soit un total de 100 personnes.
Aspects socio-économiques
Les deux études cliniques de terrain comprendront également un volet socio-économique qui étudiera notamment les connaissances, attitudes et pratiques concernant le paludisme et l’accès aux soins, et inclura des groupes de discussions dirigées vers l’amélioration de la santé dans la communauté, l’usage rationnel du médicament, la perception de la gratuité, etc.
Communication, Diffusion & Exploitation
Stratégie de communication
Le projet DPP est destiné à avoir un impact international, donc la communication, la diffusion de l’information et l’exploitation des résultats sont des éléments importants qui doivent être implémentés en temps utile.
Le site internet sert de vitrine et de point de rassemblement des informations du projet. Des mises à jour régulières tiendront l’audience informée des derniers résultats et développements, et permettront de maintenir un intérêt croissant pour ces travaux et les problématiques antipaludiques en général. Le site internet est conçu pour avoir une audience étendue allant des personnes simplement curieuses s’intéressant à l’élimination du paludisme, aux décideurs de tous les niveaux concernés. Afin de toucher le public le plus large possible, le site est disponible en version française et anglaise.
De nos jours, les réseaux sociaux sont les moyens de communication incontournables pour s’assurer de la diffusion rapide et efficace de l’information dans le monde entier. C’est pourquoi le consortium DPP dispose d’une page LinkedIn (www.linkedin.com/company/dpp-consortium) et d’un compte twitter (@DPP_consortium), avec lesquels il suit des personnes et des organisations clés travaillant dans le domaine du paludisme et d’autres maladies tropicales négligées, ainsi que dans le développement de formules pédiatriques. Via le réseau LinkedIn, le consortium a déjà été contacté par un groupe qui gère un consortium travaillant sur une autre maladie tropicale négligée.
Le contenu scientifique du projet implique d’adopter une approche énergique pour publier les données dans les revues scientifiques dans un délai convenable et présenter les résultats au forum de l’EDCTP comme à d’autres rencontres internationales, ainsi que dans le cadre de programmes de lutte contre le paludisme. De cette manière les partenaires du consortium pourront apporter leur contribution à l’élimination du paludisme tout en communiquant directement avec les décideurs. Cela posera les jalons qui, avec la préqualification par l’OMS, permettront d’enregistrer ces médicaments à base de primaquine dans les pays endémiques. A cette fin, le consortium s’est déjà mis en contact avec l’OMS et les voies de communication s’étendront au fur et mesure que le projet se développera et que le dossier de préqualification sera assemblé.
Un aspect majeur du projet DPP est de faire de la primaquine un bien public au niveau mondial. En publiant les résultats des études de masquage de goût et de galénique des médicaments à base de primaquine, d’autres industriels pharmaceutiques pourront aussi se lancer dans leur production et garder un prix compétitif.
Enfin il est essentiel que les communautés vivant dans les pays où les recherches sont conduites puissent bénéficier de ces résultats. C’est pourquoi il est prévu d’échanger avec ces communautés en commençant par le réseau établi par ReMeD de pharmaciens et de toutes les parties prenantes dans la chaine de distribution des médicaments en Afrique.
Renforcement des compétences
Le plan de développement, ambitieux et exigeant, sera non seulement une expérience d’apprentissage pour tous les partenaires, mais offrira également de précieuses opportunités aux jeunes scientifiques pour avoir un aperçu du développement des médicaments et pour poursuivre des études de doctorat et de maîtrise.
Il est prévu un programme interne de formation générale sur les aspects clés de ce projet et de formations spécifiques aux différentes activités du projet, sur la déficience en G6PD par exemple, les Bonnes Pratiques Cliniques (BPC) ou encore l’éthique en recherche clinique, dispensées par MORU et ses partenaires selon les cas.
Toutes les études seront menées conformément aux BPC ICH et suivant les principes d’Helsinki (mise à jour 2013). Les approbations éthiques seront obtenues de tous les comités d’éthique et des organismes nationaux de réglementation comme il se doit. il y aura un système de contrôle de qualité en place pour toutes les études et une attention particulière sera accordée aux exigences de l’étude de bioéquivalence pour répondre aux normes de l’OMS. La surveillance sera menée par MORU et IPCA sera activement impliquée dans l’étude de bioéquivalence.